EPEES.—L'épée est aussi considérée comme une arme d'élite, généralement observée en petit nombre dans les tombeaux francs. En Normandie, le cimetière d'Ouville, où l'on reconnut 100 squelettes, ne fournit aucune épée, et le cimetière d'En-vermeu n'en fournit d'abord que 2 sur 60 cadavres, puis une sur 65 2. Il en fut à peu près de même à Seraing, près de Liège, où, sur environ 200 cadavres, on ne vit paraître que 3 épées3. Elles se montrèrent plus nombreuses à Samson, et dans la proportion de 9 pour environ 250 sépultures.
Sauf une ou deux exceptions, nos épées se trouvaient à droite des squelettes, la poignée généralement à la hauteur de la tête ou de l'épaule. La longueur des lames, qui coupent des deux côtés, est habituellement d'environ 75 centimètres, et leur largeur de 5 à 6 cent. (PI. 2, n°20). Elles étaient, en majeure partie, intactes et sans indices d'avoir été ployées ; mais le plus souvent la poignée avait disparu, ainsi que le fourreau de bois, dont il restait parfois quelques traces ou quelques ornements. La poignée d'ivoire représentée à la PI. II, n° 18, est toutefois assez bien conservée.
BOUCLIERS.—Voici encore une arme d'élite existant rarement dans les cimetières francs, où l'on ne rencontre généralement quel'wm&o, ou partie centrale; le reste, h part les verges de fer de l'armature, ayant été, semble-t-il, originairement composé de bois recouvert de cuir ou de peaux.
Trois umbos, dont l'un d'une belle conservation, les deux autres plus ou moins détériorés, ont été mis au jour par les fouilles de Samson, et tous trois dans des tombes garnies d'épées et d'autres armes ou objets de cboix.
Le mieux conservé de ces umbos, auquel les deux autres paraissent avoir été semblables, consiste en une sorte de calotte conique en fer, haute de 9 centimètres, large, 'dans son plus grand diamètre, de 17 cent., y compris le bord existant à la base. Celui-ci a 2 cent, environ de largeur et est garni de cinq clous, trois en fer et deux en bronze, dont les têtes sont revêtues d'une mince lame d'argent. Deux autres clous de fer, dont l'un retrouvé sur le côté, devaient garnir également le bord de l'umbo et y faire adbérer le manipule ou manche.
Ce manche se compose d'une forte lame de fer arrondie, et creuse dans la partie qui se trouve en regard de la cavité de l'umbo. On a présumé que le guerrier pouvait ainsi mieux tenir en main son bouclier; mais il paraît évident que ce creux était garni de bois, car nous en avons retrouvé des fragments. Vers ses extrémités, le manipule de fer est aplati et garni de deux clous. Il fait saillie hors du diamètre de l'umbo et se termine par deux verges de fer, longues de 19 h 20 centimètres, qui s'en étaient détachées. Le sommet de la calotte possède une tête de clou revêtue d'une lame d'argent et de même dimension que les têtes qui garnissent le bord inférieur.
Cet umbo était à droite du guerrier, près de la ceinture; un second umbo, en fragments, fut recueilli vers la cuisse droite; le troisième, à gauche de la ceinture du squelette. Nous présumons que les boucliers avaient été placés sur la poitrine des guerriers afin de recouvrir leurs corps et que les umbos ont pu glisser à droite ou à gauche lors de la décomposition des cadavres.
HACHES. — Les explorateurs des tombes franques paraissent n'avoir observé jusqu'ici qu'un nombre relativement assez restreint de haches ou francisques. L'abbé Cochet les mentionne dans la proportion de 1 sur 30 squelettes ', et M. Hagemans dans la proportion de 6 sur 200 2. Au Tombois, à Védrin, elles étaient 4 sur environ 100 cadavres. Ces armes se sont trouvées dans une proportion infiniment plus élevée à Samson, où elles ont atteint le chiffre de 44 sur environ 2SO cadavres.Longues généralement de 14 à 18 centimètres, elles présentent le plus ordinairement une seule courbe dans le fer, entre, la douille et le tranchant, comme les haches qui servent encore aujourd'hui pour couper le bois. (PI. II, nos24, 25, 26, 30, 31). Nous en avons cependant rencontré certain nombre avec un tranchant formant une sorte de quart de cercle plus ou moins développé. Nous donnons ci-joint (PI. II, nos 8, 28, 29), des modèles de ces haches dont l'un se rapproche de celui dessiné par M. Hagemans5 dans sa description du cimetière franc de Seraing près de Liège. Nos haches de celte forme sont régulièrement un peu moins longues que celles de forme ordinaire. Viennent enfin de petites haches, longues seulement de 7 ii 8 centimètres (PI. II, n° 27) et placées, comme nous le dirons bientôt, dans des sépultures d'enfants.A Samson, les francisques se rencontrèrent le plus communément à la droite des cadavres, parfois à la hauteur de la tête, de l'épaule ou du genou, mais plus souvent vers la ceinture. Quelques-unes occupaient le côté gauche de la ceinture ; un petit nombre étaient aux pieds.
LANCES. — Les lances, ou framées, du cimetière de Samson, au nombre d'environ 26, se présentèrent avec des formes et des dimensions assez diverses (PL II, n0910, 12, 13,15, 17, 19, 22, i3). Leur longueur, y compris la hampe, varie de 22 à 44 centimètres. La lame elle-même a généralement quatre angles, dont deux sont plus développés que les autres. D'autres fois la lame est presque complètement plate et ne possède que deux angles. Tantôt elle est fort courte avec une très petite hampe, tantôt avec une hampe très longue. Nous avons remarqué une de ces lames dont la pointe était ployée, soit par l'effet d'un combat, soit par la pression des terres.A part un petit nombre d'exceptions, nos lances se rencontrèrent à la droite des cadavres, aux pieds ou à la tête. Trois ou quatre fois seulement, pensons-nous, on en observa au genoux ou bien à la gauche des squelettes, et, dans ce dernier cas, elles étaient à peu près à la hauteur de la ceinture.
COUTEAUX. —Le couteau est une des armes les plus fréquemment signalées dans les cimetières de la période franque- Les auteurs distinguent le grand couteau ou sabre, appelé aussi scramasaxe, dont la lame est munie généralement d'une rainure destinée à recevoir le poison, et le petit couteau qui servait également, semble-t-il, à des usages domestiques.Une chose digne de remarque pour l'étude des races fran-ques de nos contrées, c'est que le cimetière de Samson ne nous a laissé apercevoir aucun scramasaxe, et que le cimetière du Tombois, à Védrin, n'en avait produit que deux '. A Seraing, Mr Hagemans n'en obtint qu'un seul intact; toutefois il paraît avoir trouvé les débris ou la rouille de quelques autres.A Samson, les petits couteaux se montrèrent rarement et presque tous brisés. On peut donc croire que bon nombre avaient été réduits en poussière. Leur longueur est d'environ 46 centimètres (PI. II, n° il), et, autant que leur état habituel de dégradation permit de le constater, ils étaient le plus souvent à la ceinture du squelette, à droite ou bien à gauche; parfois aussi aux pieds ou aux genoux, ou même à la tête.
FERS DE FLECHES.
— Nos fers de flèches proviennent, en majeure partie, des travaux 'de carrière pratiqués à Samson avant nos fouilles. Ces fers, dessinés à la PI. II, nos 6 et 9, se trouvaient dans un pot de terre rougeàlre, mais nous ne savons quelle place celui-ci occupait près du cadavre.Il importe de mentionner aussi un morceau de silex long d'environ 4 centimètres et taillé en forme de fer de flèche (PI. III, n° S), trouvé dans la tombe d'un guerrier armé d'une épée et d'une lance. Un autre objet semblable fut ramassé sur le sol du cimetière de Samson, saus qu'on pût décider à quelle tombe il appartenait. Nous ne savons si l'on a rencontré déjà des armes en silex dans un cimetière de l'époque franquc. Dans tous les cas, ce fait nous paraît fort remarquable. Mrs Joly et Albert Toilliez ont constaté, il est vrai, la présence de haches ou marteaux en silex dans des sépultures, mais de l'époque gallo-romaine '. Ce dernier explorateur attribue le fait à un reste de fidélité du Gallo-Germain aux usages antérieurs à la domination romaine. Il faut vraisemblablement attribuer au même motif les armes en silex recueillies dans nos tombes franques.
ORNEMENTS DES FOURREAUX DES EPEES, POIGNARDS, etc. — Les épées, poignards, etc., du cimetière de Samson ne furent pas exhumés seuls de terre. On put reconnaître, dans plusieurs cas, des traces de leurs fourreaux et des ornements qui les décoraient. Des bouts de fourreaux sont représentés à la PI. III, nos i, 2, 3. Il semble qu'il faille considérer aussi comme garnitures de fourreaux d'épées différentes plaques de bronze longues de 7 à 10 centimètres, larges de 2 à 3 centimètres, et terminées d'un côté, dans leur longueur, par un bourrelet creux orné de cercles, en sorte que ces plaques ressemblent assez à des pentures. Le côté opposé au bourrelet est garni de clous munis parfois encore de pointes (PI. III, nos 6, 8). Ces objets furent constamment trouvés dans des tombes possédant des épées ou poignards et constamment aussi (sauf une seule exception, pensons-nous,) au nombre de deux par tombe. Leur position habituelle près de la ceinture fait présumer, comme le croit l'abbé Cochet, qu'ils garnissaient de chaque côté le sommet du fourreau des épées. Nous avons trouvé cependant exceptionnellement trois de ces plaques aux pieds d'un cadavre. L'une de celles-ci, qui portait encore des traces de cuir, était placée contre l'ardillon d'une boucle de ceinturon.