2e PARTIE LA VIE DANS LA SEIGNEURIE.
A.LA COMMUNAUTE ET SA POPULATION.
Dans la première partie, nous nous sommes efforcés de faire connaître les seigneurs de Mozet en insistant sur l'évolution du château. Il est tout aussi important de décrire les conditions de vie de ceux qui habitaient les petites demeures autour de la résidence seigneuriale et qui composaient la communauté de Mozet. Cette approche combien passionnante est plus difficile car les documents sont rares avant le XVIIe siècle.
La communauté sous l'ancien régime est un petit groupe de personnes unies par des obligations et des intérêts communs. Ces gens peu nombreux se connaissent tous par leur nom, prénom, surnom. Ils vivent en relative autarcie. La plupart d'entre travaillent la terre: nous aurons l'occasion d'insister sur cette activité. Quelques petits artisans produisent sur commande pour les besoins essentiels du village: les registres paroissiaux nous parlent de Derieux le maréchal, Dieudonné le cordonnier, Dangoisse le charron, Berger le tisserand (1). L'économie n'est pas cependant tout à fait fermée : des céréales gagnent les moulins de Jausse et de Goyet (2). D'autre part la communauté n'a pas assez de toile ni de boissons fermentées, elle doit se les procurer au marché des villes voisines ou auprès d'un marchand ambulant (3).
Le village n'est pas du tout industriel, il ne renferme ni moulin, ni forge, ni usine. Le sous-sol ne comprend pas de charbon, on peut cependant en retirer du sable (4), qui un rôle dans la fabrication du torchis et pour l'entretien des chaumières dont le plancher est souvent remplacé par le sol battu (S). Par contre Jausse-Les-Ferrons dont une partie appartient à la seigneurie de Mozet a une importance assez considérable pour cette époque; au XVIIIe siècle, on y dénombre «trois usines de batterie de cuivre et une tirerie de fils de cuivre» (6).
Les relevés de population que nous possédons nous donnent le nombre de feux ou de ménages. Le ménage comprenait les membres d'une famille vivant sous le même toit participant pour une part aux droits et charges de la communauté. On estime généralement qu'un feu représentait cinq personnes. Beaucoup de relevés sont faits dans un but fiscal. Or comme les pauvres ne sont pas taillables, il sont absents de ces relevés. De plus, les énumérations ne portent pas toutes sur le même ensemble géographique. il est donc difficile de donner des chiffres précis de population.
Malgré ces réserves on peut suivre une évolution globale. Les premiers paysans que nous connaissons vivaient au Xllle siècle. A cette époque le comte de Namur décida de mettre de l'ordre dans l'administration de ses finances. La population de Mozet à cette époque était encore répandue sur un territoire très vaste constitué de restes de l’alleu et de biens monastiques : on y dénombre 28 feux.
Ce territoire ne peut pas être comparé avec celui de la seigneurie que nous connaisson de façon précise au XVIIIe siècle; le village de Mozet et une partie de Jausse-les-Ferrons (7}. En 1626 la communauté comprend trois censés et huit manants (8). En 1682 il y a quinze maisons y compris les trois de Jausse (9). En 1 745, le nombre de maisons n'a pas varié mais quelques-unes sont habitées par deux ménages (10). La population va augmenter subitement vers la moitié du XVIIe siècle. En 1776. vingt-sept ménages se partagent les biens communaux (11) On pourrait attribuer cet accroissement au fait que même les pauvres non propriétaires ont droit a leur part dans les émoluments communaux ( 12). Il n'en est rien car ce chiffre est confirmé par la
suite : en 1787 la seigneurie comprend vingt-neuf maissons plus les deux censes et le château (13) et en 1791 le chiffre est passé à trente (14) >II faut attendre la findu XVIIIe siècle pour que le nombre d'habitants dépasse la centaine.
B. L'ECONOMIE RURALE.
1. LA SEIGNEURIE CLASSIQUE ET SON EVOLUTION.
Pour comprendre la répartition des terres et les rapports entre le seigneur et les ma¬nants pendant tout l'ancien régime, il est nécessaire d'avoir une idée claire de l'organisation d'une seigneurie à l'époque classique, c'est-à-dire vers le IXe siècle. Pour cette époque les documents sont muets sur Mozet mais on peut reprendre une description générale (1).
Grande ou petite, la seigneurie se divise en réserve et terre amansée. La réserve, appelée «mansus indominicatus» est exploitée par le seigneur pour son propre comte Un agent du seigneur organise le travail et le répartit entre les serfs domestiques, les corvéables et plus rarement des salariés. Cette réserve comprend des terres et des prés, des bois, des bâtiments agricoles, un moulin et une brasserie. La superficie du «mansus indominicatus» est variable, dans le namurois elle oscille en général entre 50 et 100 bonniers (2). En tout cas, elle ne constitue qu'une petite partie des possessions du seigneur.
Le seigneur dispose d'énormément de terres qu'il voudrait mettre en valeur et en plus, il a besoin de corvéables pour exploiter la réserve. Il va dès lors prendre l'habitude de concéder à titre héréditaire des portions de terrain, appelées manses, en échange d'un cens. Le cens est donc la «prestation due au seigneur en raison de la possession perpétuelle d'un fonds» (3) ; il peut prendre la forme de redevances ou de corvées.
A Mozet en 1361, le relief de la seigneurie nous met en présence de paysans qui doivent deux poules, d'autres un chapon, d'autres encore un setier (4) d'épeautre, pour certains déjà la redevance est en argent (5). Les possesseurs d'un manse pou¬vaient aussi être astreints à des corvées c'est-à-dire qu'ils étaient obligés de travailler gratuitement pour le seigneur; le plus souvent lors des grandes opérations agricoles mais parfois aussi pour des réparations au château etc...
Mais à partir du Xe siècle, le maître du domaine va créer à son profit de nouvelles charges qui ne pèseront plus seulement sur les occupants de ses terres mais sur tous les individus résidant dans une zone donnée sur laquelle il étend sa puissance. En vertu du droit de ban ou droit de commander le seigneur hautain impose des obligations à «tous ceux qui respirent son air» (6), pour la protection qu'il accorde.
Nous connaissons le détail des obligations personnelles pesant sur tous les hom¬mes de basse loi de la communauté de Mozet au Xllle siècle. A cette époque, le sei¬gneur de Mozet n'est déjà plus seigneur hautain, il n'a plus droit de ban et de justice. Le comte de Namur l'a remplacé et en 1265 il a «li cuens se taille... et li cuens se mortemain, se formorture, ses corvées et ses coumans, l'ost et le chevauchée et toute justice mais on le débat» (7).
La taille est un impôt sur le revenu qui se calculait sur les moyens de production. A Mozet elle valait 20 sous de Louvain en 1265,28 sous en 1289,31 sous en 1294 (8). La mortemain et la formoture sont des taxes très dures sur les héritages. En vertu du droit de mortemain le seigneur peut saisir le meilleur bien meuble de l'héritage d'un homme de basse loi laissant des enfants non émancipés et par celui de formoture, la totalité des meubles d'un veuf privé d'héritier direct. Les sujets devaient aussi payer un droit pour la protection accordée par le comte; «les commands». Ils étaient en outre tenus de répondre à son appel pour le service militaire, «l'ost et la chevauchée».
Au départ la superficie concédée au manant formait l'unité de redevance pour le seigneur et en même temps l'unité d'exploitation, le manse devait suffire à nourrir une famille. Rapidement l'accroissement de la population va entraîner le morcellement du manse qui cessera d'exister comme unité de redevance et désignera la maison avec ses dépendances; la propriété (9).
A partir du Xllle siècle, les seigneurs vont peu à peu cesser d'exploiter la réserve en régie et préféreront la louer à un fermier. Au XlVe siècle le faire-valoir direct est abandonné pratiquement partout.
Le paragraphe suivant décrira les classes rurales à laf in de l'ancien régime. A cette époque le seigneur continue à percevoir des cens pour la possession de bien fonds. Les redevances sont minimes et se paient encore parfois en nature. En 1733 Pierre Cornelis paie trois chapons en nature tandis que J.E. Gérard paie 24 sols pour deux chapons. Certains comme J. Gubin doivent encore deux journées de travail au châ¬teau mais ils en donneront la contrepartie en argent (10). Le seigneur de Mozet a ré¬cupéré également ses droit hautains depuis l'engager de la seigneurie au XVIIe siècle (11). Ainsi tous les manants paient deux sols et un liard pour la taille du feu. Le droit de mortemain a été racheté moyennant le paiement d'une poule et d'un setier d'avoine (12).
2. LES CLASSES RURALES AU XVIIIe SIECLE.
Au XVIIIe siècle, les documents plus nombreux permettent une reconstitution de l'économie rurale et des différentes classes à Mozet, ce qui est particulièrement inté¬ressant puisque la plupart des habitants vivent de l'agriculture.
Les gros censiers.
Les gros censiers forment vraiment une bourgeoisie rurale. Les propriétaires des fermes ne font pas partie de la population rurale, ils louent à des censiers. A Mozet ils sont trois à se partager la majorité des terres. En 1793 la ferme du château comprenait 56 bonniers, la censé du Royer, 52 et la «censé Douxflamme», 72 (13).
Les terres de la communauté se distribuaient en trois parties ou soles. Les terres d'une même sole au cours d'une même année étaient toujours consacrées à. la même culture. Sur trois soles, la première était par exemple emblavée de blancs grains, épeautre et seigle, l'autre de grains de mars, et la troisième était en jachère, c'est-à-dire laissée en repos. Au XVIIIe siècle, les jachères étaient souvent remplacées par des plantes fourragères. Cette exploitation du sol basée sur l'assolement triennal explique le morcellement des propriétés: chaque ferme cultivait des terres dans chacune des trois parties (14). Cela excluait l'usage des haies et clôtures, la pratique de l'assole¬ment triennal est aussi à l'origine de la durée des baux de location : le nombre d'années était toujours un multiple de trois de manière à ce que la fin du bail coïncide avec la fin d'un cycle.
Le gros laboureur travaille avec toute sa famille et au besoin il engage des journa¬liers. Il est indépendant car il possède plusieurs chevaux de labour. Mais il connaît aussi de mauvaises années; en 1719, la cour de Mozet procède à un inventaire de la ferme seigneuriale car le censier est en retard dans le payement du loyer et il met ses biens en gage. Les échevins trouvent huit chevaux, quatre bœufs: six vaches, sept génisses, deux taureaux, six porcs et de l'outillage agricole (15).
Cette énumération montre l'importance de l'agriculture par rapport à l'élevage. D'après les estimations faites lors du partage des biens communaux vers la moitié du siècle le terrain est assez bon à Mozet, la ferme du château rapporte 400 florins par an (16). La production est composée d'épeautre, de seigle, d'avoine, de métillon c'est-à-dire seigle et épeautre mélangés, de secourion ou orge (en très faible quantité).
Les «petits manants».
On regroupe dans cette catégorie les paysans qui possèdent moins de 15 bon¬niers. A Mozet il n'existe pas de petitesf ermes d'une dizaine de bonniers. Les trois gros censiers exploitent environ 185 bonniers et 3 journaux. Il est inutile de préciser que ces gens ne pouvaient vivre uniquement de leur récolte même s'ils étaient locataires de quelques lopins. Ils devaient donc louer leur force de travail dans les grosses! ermes. Ils pouvaient aussi élever quelques bêtes, grâce au pâturage collectif sur les biens communaux (18), certains gagnaient quelque argent en exerçant une activité complémentaire dans l'artisanat.
Les membres de cette catégorie ne sont cependant pas de vrais pauvres. Ils habi¬tent dans des maisons et non pas dans des huttes. Dans le Condroz beaucoup d'habi¬tations sont déjà construites solidement en blocs schisteux ou gréseux. Les toits sont recouverts de chaume et leur inclinaison est très forte. (19) A côté de l'habitation les manants entretiennent un «cortil» c'est-à-dire un jardin avec des pois et des fèves (20). La pomme de terre a aussi fait partout son apparition ; on commence à la cultiver à Mozet vers 1740(21) le colza fournit l'huile pour s'éclairer l'hiver (22). Comme nous l'a¬vons dit les cens réclamés par le seigneur ne pèsent pas très lourd mais le salaire sur les fermes est dérisoire car la main-d'œuvre est trop abondante. La vie est dure mais supportable.
Les autres.
Les «pauvres manants» ne possèdent rien que leur hutte. Ils ne sont pas contri¬buables ni électeurs. Ils sont journaliers et mendient.
D'autres personnes ne vivent pas de l'agriculture comme les bûcherons et les arti¬sans bien que ceux-ci possèdent très souvent un petit lopin de terre. Les officiels sont parfois des membres de la communauté mais pas toujours (23)
3. LES BIENS COMMUNAUX.
ous avons déjà souligné l'importance des biens communaux pour les petis ma¬nants: ils représentaient pour eux la seule forme de pâturage, les prairies artificielles étant l'exception. De plus les genêts fournissaient la litière aux bestiaux.
A l'origine, ces biens faisaient vraisemblablement partie du domaine du seigneur. Les habitants de la communauté avaient le droit d'en jouir : peu à peu les «communes» devinrent la propriété collective des membres, de la même façon que la censive concédée à un tenancier était devenue sa propriété de fait (24).
Au milieu du XVIIIe siècle, on peut reconstituer la nature, l'étendue et le nom des bien communaux. On le doit à un relevé effectué le 10 juillet 1765 par l'arpenteur De Gueldre (25). Il faut savoir qu'à cette époque, le gouvernement autrichien décida de procéder dans le Namurois au partage des biens communaux non boisés (26) afin d'en favoriser le défrichement et d'améliorer ainsi le rendement de l'agriculture dans la pro¬vince.
A cette époque «ceux de la communauté de Mozet» possèdent en indivis 32 bonniers dont seulement 6 bonniers de trieux et pâturages. Le reste consiste en bois. Les biens communaux se divisaient en effet en bois et terrains non boisés: parmi ceux-ci on distinguait les pâturages au sens strict, les trieux ou terrains vagues et les chemins au sens large c'est-à-dire chemins de campagne avec fossés et bas-côtés.
Les bois.
es forêts communales étaient très importantes car non seulement elles ser¬vaient au pâturage mais elles fournissaient aux habitants le bois de raspe, pour le chauffage et le bois de haute futaie pour la construction.
Un règlement de 1571 en déterminait le mode de jouissance: chaque chef de fa¬mille avait droit à une corde de leignes par an, c'est-à-dire environ 3 m3 60 de bois à brûler. Lorsque l'un d'eux désirait construire, il soumettait son plan à l'officier qui lui dé¬signait les arbres à abattre. Les modalités de pâturage dans les bois n'étaient pas pré¬cisées: elles étaient laissées à la coutume (27). En 1739 des contestations au sujet de ce règlement s'élevèrent entre le seigneur, Richard de Hemricourt et les manants (28). Il en résulta un procès qui fit naître un climat de tension dans la seigneurie. Les habi¬tants se réunissaient fréquemment pour discuter des péripéties du procès; le seig¬neur, agacé, réinsista sur l'interdiction de réunions au sein de la communauté sans sa permission (29). Un décret du conseil de Namur du 17juin 1739 autorisaun nouveau rè¬glement qui avait surtout pour but de protéger les bois en établissant des règles le patûrage (30). Les chevaux et les poulains ne pouvaient etre conduits dans les tailles que cinq ans après qu'elles eussent été coupées ; les bêtes à cornes sept ans après et les bêtes à laine qui s'attaquent essentiellement aux jeunes pousses ne pouvaient ja¬mais être admises dans les bois. En outre, au lieu de donner chaque année une corde de bois à brûler à chacun, l'officier désignerait deux bonniers de raspe dans lesquels on ferait des portions suivant le nombre de manants. Le seigneur avait droit à une part de plus mais seulement s'il résidait dans la localité. Pour le bois de construction rien n'était changé.
Les pâturages.
Pour les pâturages il n'y a pas de règlement précis. La commune était pauvre dans ce domaine, elle ne possédait que 6 bonniers de mauvaises terresputrieux qui fournis¬saient peu de pâturages (31). Ils étaient situés notamment au « Trieu au Stampiau» (le Bâty actuel) et dans tout l'emplacement contigu, au nord du château appelé autrefois le « Warichet » (32). Ces terresf urent partagées en vingt-huit portions le 17 juillet 1776 et le 27 juillet on tira au sort pour l'attribution des parts (33). La consistance des par¬celles n'est pas indiquée mais si les 6 bonniers ont été partagés comme le prévoyait le règlement (34) chaque manant a dû recevoir environ 20 ares.
C.ORGANISATION JUDICIAIRE.
1.PRINCIPES GENERAUX.
a justice sous l'ancien régime est une question bien trop compliquée pour être résolue et même résumée en ces pages (1). Quelques notions sont cependant indis¬pensables pour la compréhension de l'organisation judiciaire à Mozet.
En premier lieu, toute justice émane du seigneur. Il possède le droit de rendre la justice, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un représentant. Le seigneur ou son mandataire réunit le tribunal et le préside mais il ne prononce pas la sentence. En effet Chaque homme libre a le droit d'être jugé par ses pairs; c'est-à-dire par des individus de même condition personnelle. De même, toute opération immobilière est jugée par des possesseurs d'immeubles de même qualification juridique. Une fois la sentence rendue, le seigneur en assure l'exécution.
Ce privilège des hommes libres d'être jugés par leurs pairs va entraîner la mul¬tiplication des cours médiévales: une cour est nécessaire pour chaque catégorie de personnes ; les hommes de basse loi et les privilégiés. De même la cour ayant juridic¬tion sur les fiefs ne l'a pas sur les alleux.
Cette classification n'est pas la seule difficulté pour l'approche de l'organisation judiciaire au moyen-âge. A plusieurs reprises nous avons été amenés à faire la distinc¬tion entre seigneurie hautaine et seigneurie foncière.
Le seigneur foncier est le propriétaire du sol. Il nomme une cour de justice qui connaît des contrats de mariage et de tutelle, des émancipations, des testaments, des baux, des rentes, des procurations, des ventes, en un mot sa fonction ressemble beau¬coup à celle du notariat actuel avec en plus un droit de juridiction et de police rurale.
Le seigneur hautain quant à lui, détenait la haute justice, beaucoup plus proche de la justice dans son acception actuelle. Elle s'exerçait dans les cas punissables de châ¬timents corporels: assassinats, rapts, viols, incendies, vols. Le haut justicier faisait exécuter les sentences, aussi avait-il le droit d'ériger une potence et de construire une prison.
2.EVOLUTION A MOZET.
vant le Xllle siècle, de par sa qualité d'alleutier, le seigneur de Mozet devait posséder le droit de rendre la justice. En effet l'alleu comprenait normalement seig¬neurie et juridiction (2), du moins pour d'anciens alleux nobles comme celui de Mo¬zet.
Mais dans le courant des années 1200, le comte de Namur mit tout en œuvre pour se réapproprier la justice sur son territoire. En 1289, la justice à Mozet lui est encore contestée par le seigneur Godefroid (3). Par la suite le comte le remplaça comme seigneur hautain.
A partir du XlVe siècle, ce sont donc les représentants du comte de Namur qui possèdent la haute justice à Mozet. Pour les hommes de basse loi, la cour est présidée par un maire et composée d'échevins tous désignés par le comte. Quant aux privilé¬giés, comme le seigneur de Mozet ou le possesseur du fief du Royer, ils sont jugés par leurs pairs, sous la direction du bailli régional, celui d'Entre-Meuse-et-Arche. Pour ce bailliage, les charges de bailli et de mairie furent confiées au même titulaire à latin du XlVe siècle puis la seconde tomba en désuétude (4).
Par contre, les Mozet continuent à posséder la justice foncière, au sens défini ci-dessus. Pendant longtemps, le seigneur va siéger en personne. La cour est identifiée par le nom du propriétaire ou du lieu. En 1529, à Mozet elle est dénommée «cours des masuirs et tenants de Antoine de Mozet» (5). Les masuirs et les tenants sont les habitants du domaine seigneurial, les tenanciers des terres concédées a perpétuité par le seigneur moyennant une redevance, le cens.
Au cours du XVIe siècle, les masuirs se transforment en échevinssouvent au nom¬bre de sept et un maïeur remplace définitivement le seigneur. En 1589, la vente d'une maison se fait «sous la présidence de Pierre Anciau, mayeur de la courfoncière de Mo¬zet et des échevins...» (6). Le contenu des actes conservés correspond à la définition donnée de la justice foncière: chaque fois la cour enregistre un acte de vente; en 1529 d'un «cortil» ou jardin, en 1534 d'une rente en épeautre et en 1589 d'une maison avec jardin.
Au XVIIe siècle, dans les circonstances expliquées, (7), le seigneur de Mozet va en quelque sorte racheter le droit de haute justice. Le seigneur choisit lemai'euret les
échevins. Le candidat est définitivement admis après avoir prêté le serment prévu par la coutume, serment par lequel il certifie ne pas avçir donné d'argent pour obtenir la charge (8). Il nomme également un greffier, chargé de la rédaction des actes et un sergent qui veille à l'application des lois.
Les échevins ne sont pas des juges professionnels mais des membres de la com¬munauté, souvent même de petits manants. C'est aussi dans ce milieu que l'on recrute le sergent. Lorsqu'un délit grave doit être iugé, un échevin extraordinaire est nommé (9). Le maïeur est souvent un membre influent comme Démarche, propriétaire du Royer en 1672 ou Damoiseau, censier du château en 1733 (10). Il est fréquemment maïeur dans plusieurs endroits : en 1767 Bertrand est maïeur de Mozet, Goyet et de Jausse-Les-Ferrons. Les greffiers doivent être cultivés; souvent ce sont des notaires. De Barsy, greffier de la cour de Mozet en 1773, est très riche et correspond de façon familière avec le grand maïeur de Namur (11).
3. ACTIVITE DE LA COUR « HAUTE ET FONCIERE DE MOZET».
partir du XVIIe siècle, l'organisation et la conservation des archives par le gref¬fier s'améliorent et permettent une analyse de l'activité des cours échevinales. Pour Mozet, les documents sont conservés de façon régulière à partir de 1672 mais les sé¬ries sont incomplètes à cause de la destruction de quantité d'archives pendant la révo¬lution brabançonne (12).
En théorie, la cour foncière et la cour hautaine sont distinctes mais en fait, les mê¬mes personnes composaient l'une et l'autres et, selon la matière à traiter se consti¬tuaient en cour haute et basse.
Les affaires civiles forment la majorité du fonds d'archives de l'échevinage de Mo¬zet. Celui-ci nous livre l'enregistrement de toutes les transactions opérées au seinde la communauté: ventes, baux, aliénation, hypothèques, saisies, passées. Une liasse est réservée aux contrats de mariage, testaments et partages (13).
Parmi les délits jugés, les plus nombreux sont les délits forestiers; le sergent sur¬prend fréquemment des manants en train de couper des arbustes, de se promener dans les bois avec des chiens, de faire paître le bétail dans des endroits interdits. Ces atteintes aux bien communaux, propriété de tous les habitants, ou aux droits du seig¬neur étaient jugées à l'occasion des plaids généraux, réunions de tous les chefs de mé¬nage sous la présidence du maïeur, représentant du seigneur (14). Le sergent y faisait ses rapports et fixait les amendes. Ces amendes étaient notées dans un cahier: l'ins¬cription tenait lieu de sommation.
Des cas un peu plus graves pouvaient être réglés à l'amiable par une procédure de conciliation qui évitait les frais d'un procès. En 1750 J.H. avait molesté quelque peu P.E. L'accusé offrit de payer une amende de 32 sols, la victime accepta et l'affaire en resta là (15). Le 16 novembre 1762, LL. se permit d'aller insulter H.P. à son domicile. L'accusé appelé à comparaître devant les échevins reconnut sa faute et afin d'éviter une condamnation, offrit de payer trois livres de cire blanche, l'une à l'église de Mozet, la deuxième à l'image de la Sainte Vierge et la troisième au patron St Lambert. Il pria la cour de vouloir bien lui pardonner pour le scandale qu'il pût avoir donné en la paroisse. La cour jugea ses propositions acceptables mais exigea qu'il demandât pardon à Dieu, à la Sainte Vierge Marie et fit ses excuses à la victime (16).
Lorsqu'un accord à l'amiable n'était pas possible, la cour menait l'enquête et ju¬geait. Les moeurs rudes des habitants provoquaient souvent des bagarres. Les juge¬ments de la cour nous mettent en présence de personnages comme ce domestique qui avait blessé trois soldats à coups de pieux ou de ce fils qui, après s'être disputé à plusieurs reprises avec son père, finit par le frapper tellement que le veillard dut garder le lit pendant huit jours (17).
Les affaires criminelles ne peuvent être jugées par les échevins du village: on a re¬cours à un homme de loi. Ainsi, en 1780, un habitant de Mozet se rendit coupable du meurtre d'un enfant dans les circonstances suivantes. J.D. était dans le Bois-Wiame en train de ramasser du bois en compagnie de trois enfants. J.H., âgé de dix ans avait lié sa charge quand J.D. voulut enlever le lien de la charge de l'enfant pour s'en servir. Le petit frappa J.D. à l'épaule avec le lien. Dans un accès de colère J.D. lui enfonça un cou¬teau dans le ventre. L'enfant mourut le surlendemain. Les documents ne nous fournis¬sent pas l'arrêt rendu par la justice mais permettent de se rendre compte de la manière dont l'affaire fut traitée. La douairière de Ghisels, dame de Mozet, nomma un échevin extraordinaire en la personne de P. Mahy, licencié en droit et avocat au conseil de Namur(18).
A la fin de l'ancien régime, les parties pouvaient se pourvoir en appel devant le conseil provincial de Namur. Les enquêtes menées par ce conseil nous livrent une his¬toire assez pittoresque. En 1672, deux journaliers de Mozet, Jean Demptines et Pierre Joris, qui travaillaient à la ferme de Basseilles, après avoir bu quelques verres, conclurent, un pari selon lequel celui qui épouserait ia dame de chambre de la dame d'Arville devrait à l'autre une somme fixée. Les deux compères signèrent l'accord. Jean Dem¬ptines ayant effectivement épousé la belle convoitée réclama en vain son dû. La sen¬tence de la cour de Mozet ne l'ayant pas satisfait, il en appela au conseil provincial..( 19)
D. ORGANISATION ADMINISTRATIVE.
Sous l'ancien régime la communauté était formée de personnes unies par des des obligations et des interêts communs. La communauté était une personne morale. Elle possédait des biens, elle devait en répartir la jouissance de façon équitable, les défendre contre les interêts particuliers et contre les étrangers, elle pouvait les louer,, aliéner ou vendre si le besoin s'en faisait sentir. Elle avait aussi des charges. Une admi¬nistration solide était donc nécessaire.
En théorie le seigneur est le chef qui veille aux intérêts du village. Ses représentants, maïeurs et échevins jouaient un rôle important dans l'organisation administrative. Mais les habitants, «-ceux de la communauté» participaient aussi à la plupart des décisions par l’intermédiaire des assemblées de communauté «les plaids généraux».
1.LES PLAIDS GENERAUX.
Les plaids étaient des réunions publiques des chefs de ménage (hommes et veu¬ves) destinnées à régler des questions administratives et judiciaires. Ils procédaient directement des « placita generalia» qui fonctionnaient sous la monarchie franque (1).
Ils ont ainsi une origine très ancienne: depuis Charlemagne, ils se tenaient trois fois par an. aux Rois (6 janvier), à l'époque pascale et à la Saint-Remy (1 er octobre). Le seigneur à l’origine puis le maïeur présidait l'assemblée. A Mozet, les procès-verbaux des plaids sont conservés depuis 1672 mais de façon très irrégulière (2). A cette époque les chefs de ménage se reunissaient au château après convocation du sergent. La scéance se déroule selon un ordre précis.
D’abord l'officier du seigneur rappelle les règlements, ordonnances royales coutumes locales. Il fixe ensuite les amendes pour les personnes prises en infraction par le sergent.
Les textes des plaids généraux réunissant les réglements et les jugements des petits délîts, donnent un aperçu de la vie dans la communauté (3). Il était interdit de fré¬quenter les cabarets pendant les offices divins, de même que le soir après 22 h en été ~: 2 * n en hiver. On ne pouvait travailler le dimanche qu'avec la permission spéciale du curé et après en avoir averti le maïeur ou un échevin. En général ces prescriptions étaient respectées. Parmi les mesures préseiyants droits du seigneur, la plus dure semblait être l'interdiction de chasser. Les braconniers étaient nombreux car pour les petits manants, la viande était rare (4). Nous avons déjà parlé des nombreuses infrac¬tions aux règlements sur les biens communaux (5). La communauté devait aussi se protéger des habitants des villages voisins qui parfois voulaient profiter de ses biens (6). En général la collectivité redoutait l'arrivée d'étrangers qui aurait réduit leur part dans les émoluments communaux (7). D'autre part elle craignait que les nouveaux venus ne troublassent l'ordre ; il était défendu de louer une maison à un étranger sans la permission de l'officier et sans s'être assuré des bonnes moeurs de l'individu (8).
Après avoir lu les règlements et fixé les amendes, le maïeur collectait toutes les re¬devances dues au seigneur pour la jouissance de la terre ainsi que pour la taille et le ra¬chat du droit de mortemain (9).
En fin de séance l'assemblée délibérait et votait les décisions concernant les biens communaux. Par exemple on mettait en adjudication l'entretien des chemins pour trois ans. L'adjudicataire devait les remettre en état deux fois par an, après l'hiver et en septembre - octobre (10). Lorsqu'aucun amateur ne se présentait, la commu¬nauté devait se charger du travail, elle fixait le salaire par journée à payer aux manou-vriers (11). Dans des circonstances extraordinaires, les manants pouvaient décider de vendre une partie des «communes»; en 1747 ils mettent à prix des chênes et hêtres pour subvenir aux frais de la guerre (12).
Depuis l'origine les décisions se prenaient à la majorité des voix des chefs de mé¬nage présents à l'assemblée : en principe tous étaient là car une amende sanctionnait les absences ( 13). Mais la procédure fut modifiée au cours du XVIIIe siècle. Une ordon¬nance de Marie-Thérèse du 16 février 1756 (14) instaura une sorte dévote plural et censitaire. Les non-propriétaires n'avaient plus aucune voix. Les propriétaires d'au moins 15 bonniers; avaient seuls le droit de vote et chaque charrue (superficie de 30 bonniers) possédée au-delà de ce chiffre conférait une voix supplémentaire. Les pe¬tits manants n'avaient plus qu'une voix pour cinq, voix exprimée par un représentant élu chaque année.
A l'occasion du plaid de Pâques du 12 avril 1757 on nomma pour la première fois des commis ; les petits manants au nombre de dix élirent deux personnes chargées de défendre leurs intérêts. Le seigneur de Mozet, le propriétaire de la «censé Douxflam-me» et celui du Royer avaient chacun deux voix puisqu'ils possédaient plus de 45 bon¬niers. Le seigneur établit son maïeur pour parler en son nom, les deux autres choisirent leur cerisier (15). Cette répartition des voix doublait donc la prépondérance économique et sociale des gros fermiers d'une prépondérance politique. A la fin de l'ancien régime, un certain équilibre fut rétabli car les paysans, au nombre de trente, avaient par conséquent six voix (16).
2.LES CHARGES PUBLIQUES.
Au cours du XVIe siècle l'aide à accorder au souverain par les provinces se géné¬ralise et se régularise. La répartition des charges publiques ne se faisait pas dans le cadre des plaids généraux. L'impôt direct, la taille, comprenait deux éléments (17). L'impôt personnel, appelé vulgairement «manandise» était payé par tous les hom¬mes du village à l'exception de ceux qui cultivaient au moins trente bonniers. L'impôt foncier était toujours levé au XVIIIe s. sur base du terrier de 1602, cadastre sommaire (18). Au niveau supérieur, les députés des Etats de Namur et le gouverneur dressaient l'assiette pour l'ensemble du comté. Mozet, Mont et Arville étaient taxées ensemble.
Un ordre signé du gouverneur leur était envoyé avec la somme à fournir en trois termes. Les maïeurs et échevins des trois communautés se réunissaient et procé¬daient à l'adjudication de la collecte des impôts.Elle était attribuée à l'amateur qui exi¬geait le plus bas salaire et qui pouvait fournir immédiatement une caution importante. La répartition entre les habitants était fixée par les officiels, Lasomme était divisée par le nombre de contribuables, ce qui donnait l'unité, «la paye». Le château de Mozet de¬vait trois payes, ainsi que les grosses fermes, les petits manants étaient taxés pour la moitié ou le quart d'une paye, parfois moins (19).
E LA PAROISSE.
On ne peut pas parier de la vie des habitants de Mozet à une époque où pratique¬ment tout le monde était réputé catholique pratiquant sans souligner le rôle de la pa¬roisse et du curé. L'église était véritablement le centre de la communauté et le curé jouait un rôle public considérable.
Il n'est pas dans notre intention d'analyser en détail l'origine et l'évolution de la pa¬roisse de Mozet (1). Elle existe au début du Xlle siècle. Au début sa circonscription s'i¬dentifie à l'alleu (2). Par la suite, elle restera bien plus étendue que le village de Mozet "ième si elle perd Mont-St-Marie et Maizeroule, au Xllle siècle. Au début du XVIIIe siè-: s ,a paroisse comprend Mozet, Basseilles, Goyet excepté Struviaux et cinq autres liaisons, Limoy, six maisons à Jausse, quatorze maisons aux Tombes et la plus grande partie de Faulx y compris le château (3). La paroisse de Faulx est une création du XIXe siècle.
Le seigneur de Mozet avait son mot à dire dans l'organisation de la paroisse. Avant l'érection du diocèse de Namur en 1559 (4), il possédait en partie le droit de patronage. Ce droit consistait à l'origine dans la faculté laissée au fondateur d'une église de pré¬senter le prêtre chargé de la desservir. Les successeurs du fondateur héritaient de cette prérogative. Le seigneur de Mozet possédait ce droit conjointement avec Guil¬laume de Ciney au Xlle siècle puis avec les possesseurs du fief du Royer depuis 1343 (5).
Les revenus du curé étaient variés et relativement importants. Nous avons déjà constaté qu'en 1793 il possédait cinq bonniers dans la communauté ce qui en faisait le plus gros propriétaire après les possesseurs des trois fermes (6). Mais ses biens s'é¬tendaient aussi aux autres sections de la paroisse : en 1787 le curé Duchesne déclare cultiver dix bonniers et demi de terres. Il explique qu'il les exploite lui-même: à son arrivée trois bonniers seulement étaient labourés et il a dû travailler énormément pour mettre l'ensemble en valeur (7). Il jouissait en outre d'une partie des revenus de la di¬me. La dîme se manifestait par le prélèvement en nature d'une partie de divers pro¬duits, au départ la dixième partie. Elle était divisée en trois catégories. La grosse dîme affectait les céréales, le vin et l'huile. La menue dîme concernait le petit bétail, la laine, le lin, les fruits et légumes. La «dîme novale» se prélevait sur lesbiensnouvellement dé¬frichés et sur les terres non encore cultivées. Au XVIIIe siècle la moitié de la dîme allait au curé de Mozet, l'autre moitié était partagée entre l'Evêque de Namur et les Jésuites de Liège (8). En 1787 la vente des dîmes rapportait environ 400 florins au curé (9). Nor¬malement les décimateurs étaient charges de l'entretien de l'édifice religieux et du mobilier en proportion des revenus. Mais l'abbé Duchesne explique que cet argent est nécessaire pour son entretien et pour les oeuvres de charité (10). Le chef de la parois¬se avait d'autres rentrées d'argent ; les rentes, le casuel, les offrandes, les fondations d'anniversaire. Il percevait encore le «droit de Pâques lors de l'accomplissement du devoir pascal, deux sols pour les mariés, un pour les non mariés (11).
La cloche de l'église appelait les fidèles à la prière mais indiquait aussi l'heure et rythmait leur vie. C'est le tocsin qui les appelait pour les assemblées publiques: tous les manants devaient sortir au premier coup de tocsin (12). Le curé avait soin de faire respecter la loi : il était tout à fait interdit de travailler le dimanche et jours de fête reli¬gieuse et de fréquenter les cabarets pendant les offices.
Le curé s'occupait de nombreuses activités. Depuis le concile de Trente (1545-1563) il assurait la tenue des registres de baptêmes, mariages et décès. A Mozet, pa¬roisse rurale, la tenue régulière des registres ne commence qu'à la fin du XVIIe siècle (13). Jusqu'au deuxième tiers du XVIIIe siècle les actes sont rédigés en latin et som¬mairement. C'était encore le curé, aidé du marguillier qui apprenait à nos ancêtres les rudiments d'instruction. En 1666, l'école était tenue parlemarguillier..En1707elleétait fermée faute d'élèves :par conséquent cela n'a rien d'étonnant si la plupart des paroissiens ne pouvaient même pas signer (14). Beaucoup de paroisses, possédaient une «Table des pauvres» dirigée par la curé, par laquelle la communauté subvenait aux besoins des indigents et malades. A Mozet cette institution n'existait pas, «il n'y a pas un denier de table des pauvres» et le curé puisait dans les revenus de la dime pour soulager les pauvres. payer l'école à leurs enfants et visiter les malades (15).