Accueil  //  >> Les villages  //  >> De village en village >> Faux-les-Tombes  //  >> Abbaye de Grandpré (1231-1794)

Image
Grandpré
Avant de partir en Croisade contre les Albigeois, Philippe II, comte de Namur, autorisa l'érection d'une abbaye cistercienne sur ses terres, mais la chose ne put être effective qu'après sa mort. En 1226, sa soeur aînée, Marguerite de Courtenay, épouse d'Henri de Vianden, prit contact avec l'abbé de Villers-1a-Ville, Guillaume de Dongelberg, qui accède à son désir et envoie 12 moines avec abbé faire une nouvelle fondation sur le territoire de Mozet au lieu dit Grand-Prez à Faulx. Il faut dire qu'en cet endroit même se trouvait déjà une grange gérée par l'Abbaye de Villers. Ceci  explique le choix des lieux. C'est ainsi que le 15 août 1231. la nouvelle abbaye sous le patronage de Notre-Dame, voit le jour. Et l'année suivante, l'Evêque de Liège, Jean d'Aps, procède à la consécration de l'église abbatiale. L'abbaye rayonna durant 5 siècles et demi jusqu'à sa fermeture à la révolution française.

(vous pouvez lire également : R. Blouard , L'abbaye de Grandpré - 1954)

 

 



Origine et fondation de Grandpré

Image
Archives de l'Etat à Namur
"L'An de l'Incarnation du Seigneur 1231, en la fête de l'Assomption de la Sainte Vierge, a été fondée l'abbaye de Grandpré, par Marguerite, comtesse de Vienne, au moyen des biens qu'avait établi dans ce but5 son frère Philippe, comte de Namur, qui, ayant pris la croix contre les hérétiques albigeois, mourut en chemin et fut enterré à Vaucelles ; à cette abbaye, douze moines avec un abbé furent envoyés de Villers, par l'abbé Guillaume, le 11 août de l'année 1231 ; comme ils approchaient de Namur, le clergé de la ville, avec le  peuple, alla à leur rencontre en procession, il les reçut avec une .grande ferveur et les conduisit au lieu de Grandpré".


Image
Archives de l'Etat à Namur
C'est en ces termes, ou en termes équivalents, qu'est signifié, plusieurs fois, dans les archives de Grandpré, l'établissement du nouveau monastère. Nous connaissons donc les fondateurs de Grandpré : le comte Philippe de Namur, partant pour la croisade contre les Albigeois, avait, comme beaucoup de ceux qui se croisaient, destiné, sans doute en guise de voeu, une partie de ses "biens à une fondation religieuse. Après sa mort, survenue en 1227 , la soeur de Philippe, Marguerite, épouse du comte Henri de Vianden, accomplit la promesse de son frère et fit appel à l'abbé de Villers pour transformer le statut de grange en celui d'abbaye, La fondation fut approuvée, sur le plan civil, par
Fernand de Portugal, comte de Flandre et par son épouse Jeanne.

ImageEssayons de voir la filiation qui rattache Grand-pré à Cîteaux, berceau de l'ordre cistercien.
Dans les Vingt premières années du Xllème siècle, les premiers monastères cisterciens virent le jour, et à la mort de Bernard de Clairvaux en 1153, plus de 500 abbayes cisterciennes existaient déjà. Parmi elles, la célèbre abbaye de Villers-en-Brabant, fondée en 1146 par Clairvaux (1115). Le 7 avril 1146, 17 religieux sous la conduite de l'abbé Laurent, désigné comme tel par S. Bernard de Clairvaux, quittèrent cette abbaye pour s'établir dans un petit domaine de la vallée de la Thyle, affluent de la Dyle, lieu sauvage et boisé, qu'ils acquirent près de la fontaine Goddiarche à Gémioncourt (Baisy-Thy).
Richement dotée, l'abbaye de Villers-la-Ville possédait dès la fin du Xllème siècle, une "grange" près de
Faulx-les-Tombes, appelée Grand pré ; une autre à Tronquoy (Wierde) et une troisième à Borsu (Gesves). la grange de Grandpré est le berceau de l'abbaye de 1231.
Une "grange" était une sorte de ferme appartenant à une abbaye .
On n'y trouvait pas de moines mais des frères convers, des ouvriers, parfois des serfs qui trouvaient là liberté en y entrant.
Villers avait ainsi réalisé sa première fondation, près d'un siècle après sa propre fondation, et quoique monastère fervent et bien peuplé, Villers n'allait plus fonder qu'une autre abbaye Saint-Bernard sur l'Escaut. L'ordre cistercien s'introduisit ainsi à l'est de la Meuse, sur les marches du plateau condruzien. Dans le Namurois cependant, d'autres couvents, non-cisterciens, étaient construits depuis longtemps.Quant aux abbayes cisterciennes, elles seront presque toutes édifiées à l'ouest de la Meuse, et dans le triangle Namur, Liège, Marche -en-Famenne , on ne trouvera que Grandpré .



La vie religieuse et intellectuelle des moines de Grandpré
Les moines suivaient donc la règle de Cîteaux basée, comme on l'a vu, sur la Charte de Charité.
Les Cisterciens vivent seuls avec Dieu, priant, jeûnant et travaillent sous son regard.
Le site de Grandpré, favorise la solitude et le recueillement de la communauté, fidèle à la règle cistercienne et aux enseignements reçus à Villers.
Les religieux de Grandpré s'efforcent de réaliser l'idéal de leur vocation par l'accomplissement des exercices religieux quotidiens, par le chant des heures liturgiques, par le travail manuel, par leur intervention dans le ministère paroissial, par leur charité à l'égard des pauvres et des malheureux. Dans la nourriture, le vêtement, le sommeil, dans toute la manière d'être, le Cistercien est soumis à un régime austère.
Une nourriture pauvre, composée presque uniquement de légumes, d'huile, sel et d'eau garnit la table. On ne prend que deux repas par jour, vers midi et vers six heures et du 15 septembre à Pâques, un seul repas est de règle.
La nuit se passait dans un dortoir commun. Les lits ne consistaient qu'en une simple paillasse étalée sur une planche.
La devise de l'abbé Defrenne "Delectamur in umbra" et le millésime 1772 que l'on voit sur le portail actuel de l'abbaye apparaissent comme le signe de la fidélité de Grandpré à l'esprit cistercien.
En ce qui concerne la vie intellectuelle des moines de Grandpré, nous nous contentons de rapporter ici ce qu'en dit R. Blouard, dans son ouvrage sur Grandpré : "La communauté de Grandpré comptait en moyenne 12 à 15 religieux et quelques frères convers. On ne peut dire qu'il se révéla-, parmi les moines, des éléments de très grande culture intellectuelle ou artistique. Quelques-uns firent des études supérieures à l'université de Louvain. Ils possédaient une riche bibliothèque composée, principalement semble-t-il, de livres d'ascèse et de mystique, de quelques exemplaires de
"Vitae", mais il ne paraît pas qu'elle fut pour tous un instrument de progrès notoire dans les sciences, la littérature et les arts," (R. BLOUARD, Grandpré, p. 23)
La fondation et les premières années de Grandpré ressemblent à 1'histoire de beaucoup d'autres abbayes cisterciennes de notre pays : de grange elle devient abbaye ; sans jamais faire parler d'elle, l'abbaye vit calmement et "sans histoire" jusqu'à la révolution française, où elle disparaît dans la tourmente.
Evidemment, lorsque la bonne marche de l'abbaye est assurée, on ne peut rien signaler... Or, en fait, pendant les 650 ans de la vie monastique de Grandpré, on n'y connut seulement que quelques années de troubles, et l'on doit dire que, sans être exemplaire, la vie des moines fut certainement édifiante.
La cause principale de ces difficultés trouve son origine dans le fait que l'abbaye fut très peu peuplée, nous l'avons vu. Or, les religieux devaient choisir leur abbé, ou bien l'un d'entre eux, ou bien un moine de leur maison-mère. Et comme le nombre de personnes capables était très restreint, on devait souvent faire appel a des religieux d 'autres abbayes cisterciennes. C'est alors que des mentalités différentes s'affrontèrent et que les conflits éclatèrent.
C'est ainsi qu'au 14ème siècle, la succession d'Henri de Faux, qui devint abbé de Villers en 1330, posa de graves problèmes. En effet, Désiré de Brigode, alors prieur de Villers lui succéda à Grandpré et deux ans plus tard à Villers.
Ce mouvement a du entraîner la crise qui éclata ouvertement en 1356 lorsque Alard de Saint-Amand était en conflit ouvert avec Rome. Alard était un intrus et il fallut toute l'autorité du Pape, de l'évêque d'Utrecht, de l'abbé de Saint-Laurent de Liège et du doyen de Sainte-Gudule de Bruxelles pour faire accepter la nomination de Herman de Villers et 1'écartement d'Alard de Saint-Amand. Des documents relatifs à cette affaire se trouvent aux Archives Vaticanes.
Il y eut encore une crise semblable, au XVIème siècle avec la nomination de François Belfroid, prieur de Villers, qui n'eut pas les capacités requises pour la charge abbatiale. Son successeur Pierre Emmens, voulut alors résoudre les problèmes, presque par la force, en imposant quelques frères convers de Nivelles qui accaparèrent le temporel de l'abbaye et dillapidèrent une partie des revenus de Grandpré.
(Le paragraphe est inspiré en partie de "Grandpré", Abbaye Cistercienne Rochefort 1978)
Au XvTIIème siècle, les Hollandais ont dévasté et incendié la plupart des bâtiments de l'Abbaye.
Il faut mentionner, dans un autre contexte, l'abbé Etienne Defrène ou Defrenne, élu en 1761 et qui fit restaurer le porche, avant de mourir à Namur en 1774.
Le dernier abbé, Robert Englebert, eut la douleur de voir la suppression de son abbaye et la dispersion des religieux, dont quelques-uns restèrent toutefois à Grandpré jusqu'en 1808 ou 1809. Les biens des religieux furent alors inventoriés, et plus tard vendus à des particuliers.

En ce qui concerne la fin de Grandpré, nous reprenons ici ce qu'en dit R. Blouard, et nous lui laissons la responsabilité de ses affirmations : "Pendant la Révolution, le monastère vécut les horreurs de la furie déchaînée ; ni
la tradition orale, ni les archives ne parlent de destructions totales et systématiques, il y eut surtout pillage de la part des étrangers et des habitants de l'endroit qui, au dire des vieilles gens, étaint heureux de profiter de l'événement pour "récupérer", pendant l'exode des moines, une partie des prestations en nature, en vivres,qu'eux et leurs ancêtres avaient dû fournir à l'abbaye ; on peut dire, à leur décharge, qu'ils sacrifiaient aux idées nouvelles que la Révolution répandait dans les masses, par la persuasion et par la force."


{atipsjp 114|35}Les abbés {/atipsjp}
Nous n'allons pas citer les noms des 51 abbés qui se succédèrent à la tête du monastère de Grandpré. Le premier abbé fut Jean, moine de Villers, le dernier fut Robert Englebert, élu en 1793.
Parmi les plus illustres ; Bernard de Mont-St-Guibert (I3ème siècle), Jean de Streeuw (I4ème siècle), Jean de Maillen (15ème siècle), Batthélémi Poisson (I6ème siècle), Charles Dethier, Etienne Defrène, Albert Rochette, (18ème siècle).
La pierre tombale de Barthélémi Poisson se trouve à l'église de Sorée.
Peu de moines de Grandpré étaient originaires de la région, Henri de Faux, abbé de Grandpré de 1320 à 1323, Jean de Maillen, mort en 1447? Gérard de Maillen, abbé de 1447 à. 1469, Jean Morial de Haltinnes, de 1470 à 1479, François de Larbrespine d'Andenne, abbé en 1669.
(R. BLOUARD, Grandpré, p. 93)

R. Blouard se pose la question de savoir pourquoi si peu de moines étaient originaires de la région ; nous rapportons ici son hypothèse : "Cette pénurie de vocations dans les environs immédiats du monastère me semble être imputable à deux causes : la première, c'est que le condruzien, autrefois comme aujourd'hui, possède un tempérament frondeur et indépendant ; la deuxième, c'est qu'il connut au Moyen Age des conditions de vie difficiles ; il dût travailler opiniâtrement pour arracher à la terre les ressources nécessaires a sa subsistance et à celle de sa famille ; il n'eut pas souvent le loisir de s'évader vers les choses de l'au-delà ; il fut obligé a des prestations humiliantes pour son
caractère. Tout en restant fidèle à sa foi et aux pratiques chrétiennes communes, il ne pensa pas à s'engager dans les milices sacrées, régulières ou séculières, peut-être ne se crut-il pas digne d'un pareil état de vie."


Si les monastères ont la réputation d'avoir des biens considérables, il ne faut pas oublier qu'ils ont parallèlement des charges importantes. C'est ce qui va nous guider dans notre étude sur la vie économique de Grandpré .


S'il est certain que les religieux cisterciens doivent vivre d'abordpour la louange liturgique et la prière, il n'est pas moins certain,que pour prier il faut vivre et donc travailler et gérer un domaine.Pour expliciter un peu ce que fut la vie économique de Grandpré , nousnous contenterons de résumer les grandes lignes de l'ouvrage surGrandpré de R. Blouard. Cet ouvrage est le seul consacré à ce sujet. R.Blouard a étudié minutieusement les archives de Grandpré et sonouvrage, à cet égard, intéressée surtout les économistes, lesgénéalogistes et les topo-nymistes .

Domaine foncier, rentes et revenus de Grandpré

Le domaine foncier, les rentes et revenus divers de GrandpréSitôt les moines de Villers installés à Grandpré, ils mirent tout en oeuvre pour préciser leur patrimoine initial. Le domaine foncier de l'abbaye de Grandpré étendu et éparpillé en beaucoup d'endroits du Condroz, groupait des propriétés acquises au monasstère par des donations, faites le plus souvent par des hommes libres, des nobles, des chevaliers, par des ajouts ou les apports de certains membres de la communauté .
Administration du domaine foncier
L'abbaye de Grand pré possédait plusieurs cours foncieres. Une cour foncière était une institution quj exerçait la justice et gérait un domaine particulier au nom de l'Abbaye.

- Cour foncière de Monceau, dont le nom est perdu aujourd'hui, comprenait une étendue assez importante du territoire de Faulx.

- Cour de Jausse ou de Visin : la tradition orale ign re oompletement l'appellation "Visin" qui autrefois, désigna souvent le hameau actuel de Jausse, et la cour foncière qu'y posséda l'abbaye. (Jausse est un hameau actuel de Faulx-les-Tombes ) . Il faut parler de ce domaine de l'abbaye car une industrie du fer y prospéra longtemps.
On trouve dans les documents, la "forge l'abbé", dont le plus ancien propriétaire était Grandpré . D'autres l'occupèrent au cours des siècles. Une fabrique de clous y fonctionnait encore vers 1870. On cite aussi la forge "Denis", située à l'endroit "Al tiesse di Keuve" parce qu'une cuivrerie y a fonctionné. Il existe encore dans certaines vieilles maisons comme le presbytère, des clenches en cuivre de fabrication régionale.
N.B. : Florivaux sur le territoire de Jausse fut aussi le siège d'une forge et d'un laminoir ; on y fabriquait des tôles, puis une filature y fut installée. On appelle toujours cet endroit : La fabrique.
L'abbaye possédait aussi un moulin à Jausse, La juridiction de la cour de Grandpré s'étendait aussi sur le hameau de Maizeroule (voir chapitre sur ce hameau).

- A Wierde, où se trouvaient des biens importants de la fondation de 1' abbaye, une cour foncière réglait aussi les affaires administratives les concernant.

- L'abbaye de Grandpré obtint en 1283 de la générosité de Guillaume, comte de Flandre et marquis de Namur, la seigneurie foncière de Sart -Bernard , avec le droit de chasse.

- Trois sections (Trieu d 'Avillon-Fays, Vivier l'agneau, Sart-Mathelet et les Loges) qui constituent le localité de Courrière faisaient partie du domaine foncier de Grandpré. E. Blouard rapporte d'après les archives que le droit de chasse fut souvent l'objet de litiges après l'acquisition de la seigneurie par Grandpré, celui-ci fit appel à témoins pour délimiter les limites exactes de la seigneurie et, par conséquent, de la chasse. Le principal témoin fut un certain Lambert Bertrand, 75 ans, "affréteur aux "bécasses et a la chasse au gros gibier". Il note qu'il n'avait jamais vu, ni entendu dire que, par exemple, les seigneurs d'Arville y avaient droit de chasse, "sinon, qu'il y a plusieurs années, ils ont chassé les loups, mais avec ceux de Grandpré ; avec eux aussi, ils ont chassé le sanglier". Ceci se passait au début du 18ème siècle.

- Cour foncière de Spinoit (Gesves)

- Domaine foncier de Florée

- L'abbaye possédait également des propriétés à Goesnes et Hodoumont, à Sombreffe, à Wasseige et Merdorp.

 

- Comme la plupart des abbayes médiévales, celle de Grandpré avait son Refuge . Il était situé rue Notre-Dame à Namur.
Après la Révolution française, il fut vendu à des particuliers. Il a été détruit, lors d'un bombardement de la ville en 1940.

Rentes foncières de Grampré

Rentes foncières en nature et en argent.Se rattachent au domaine foncier les nombreux droits de rentes qui affectaient les biens de l'abbaye, affermés par elle, ou des héritages particuliers. On relève des noms de débiteurs dans de nombreux endroits, par exemple : Ambresin, Andoy, Assesse, Bouge, Dave, Gesves, Haillot, Jambes, Mozet, Namur, St-Servais. . . L'abbaye percevait aussi des revenus de nature ecclésiastique à Filée, Hemptinne (Eghezée), à Longchamps, à Sorée, " etc.

Obligationsde l'Abbaye

Les obligations de l'abbayeLa communauté de Grand pré avait, nous l'avons dit, des charges.Charges publiquesAu Moyen-Age, le Comte de Namur percevait la taille (impôt proportionnel basé sur la capacité de l'exploitant du sol et la valeur des moyens de production) sur des propriétés de l'abbaye à Gelbressée, Cognelée, Temploux, Namur...Les charges publiques les plus onéreuses furent les contributions imposées par les Princes et les Etats ou, en temps de guerre, par les armées belligérantes, on les appelait "aides" ou "subsides". On en trouve surtout au 15ème et au 16ème siècle.La réparation des désastres provoqués par les guerres fut une lourde charge pour l'abbaye. Souvent, lorsque les monastères n'étaient pas détruits complètement, ils étaient pillés ou convertis en casernes ou en hôpitaux. Par exemple, on sait que Grandpré fut dévasté et incendié par les Hollandais, au I8ème siècle.


Autres charges

L'Abbaye était obligée à d'autres redevances sur ses propriétés, par exemple à l'abbaye de Géronsart, au curé et aux pauvres de Gesves, au curé de Mozet, à l'évêque de Narnur, au curé de Saint-Nicolas à Namur, au curé de Maizeroule, etc.
L'abbaye payait aussi des rentes viagères à certaines personnes. Ces rentes étaient souvent le revenu annuel des terres données à l'abbaye, ou des sommes d'argent converties en terres.
Les personnes qui achetaient des pensions viagères étaient souvent des époux sans enfants, des célibataires, des prêtres ou des religieux, le plus souvent malades, vieillards ou Infirmes ; elles abandonnaient leurs biens qui ne pouvaient plus les nourrir à condition d'être entretenus pendant le restant de leur vie par 1'abbaye.
Il y avait aussi évidemment les dépenses relatives à l'intérieur de l'abbaye, la nourriture, l'habillement, le chauffage, l'entretien et la réparation des bâtiments les frais de médecin, l'éclairage, l'hospitalité envers les étrangers, les gages du personnel, C'est ainsi qu'on sait qu'en 1774 le personnel fonctionnaire et domestique comprenait un cuisinier, le domestique de l'abbé, un cocher, un valet d'hôtel, un garçon de cuisine, un jardinier, un. brasseur, un maréchal, un charron, un portier, un sergeant (garde) pour Grandpré et trois autres à Trieu, Florée et Wierde, une lingère et trois servantes. A cela, il faut ajouter les dépenses pour l'église et le couvent, ainsi que la bienfaisance envers les pauvres.
En 1781 "Pour les grains, pains, vin, bouillons, thé, viandes, sucre, bière et bois qui se distribuent journellement et volontairement en charité, tant aux pauvres mendiants des environs qu'aux pauvres malades, il faut, par an une sommes de 700 florins", ((1) R. BLOUAKD, Grandpré, p. 108)

 



Qui sont les Çisterciens ?
Les Cisterciens sont les religieux de la famille de Cîteaux. Ponde en 1089 par S. Robert de Molesme pour y mener une vie plus austère que dans les monastères contemporains, Cîteaux, grâce à l'activité de ses premiers abbés (S. Aubri, 1099-1108 ; S. Etienne Harding, 1109-1133), surtout grâce à l'entrée de S. Bernard en 1112 et la fondation de Clairvaux, devint le centre d'un Ordre qui étendit ses monastères dans toute l'Europe chrétienne médiévale. De nombreux textes législatifs, en particulier LA CHARTE DE CHARITE (1119), fixèrent les usages cisterciens.
Art, chant, liturgie furent marqués fortement à Cîteaux par le partipris de sobriété . La ferveur s'étant relâchée, de nombreux essais de réforme eurent lieu dont le plus célèbre est celui de l'abbé de Rancé au XVIIème siècle, à l'abbaye de la Grande Trappe. S'il ne reste à peu près rien des anciens monastères de Cîteaux et de Clairvaux, on peut voir encore de bons exemples de l'art cistercien ancien, notamment à Pontigny, Pontenay, Sénanque, le Thoronet en France, ou Possa Nova en Italie.


ImageDescrigtion des bâtiments actuels de l'abbaye
Grandpré est situé rue de l'abbaye à Faulx-les-Tombes, au carrefour des routes qui vont à Gesves et à Courrière.
Une grande porte-cochère, disparue, fermait jadis un porche d'assez grande dimension (4m65 de large et 8m35 de profondeur), qui ouvre d'abord sur le passage en dessous du porche, ensuite sur une cour intérieure. A droite un logis à deux étages et à gauche 1'habitation des fermiers. Ce porche est classé par la commission des Monuments et des Sites.
ImageSa restauration en 1975 a permis de donner tout son éclat a la statue de la Vierge, taillée dans la pierre, dans une niche en plein cintre. Sur le fronton du premier étage, on voit deux petites colonnes, couronnées de boules, le tout en pierre, contrastant avec les briques rouges et le toit en bulbe d'ardoises bleutées. Ce bulbe en style mosan est le seul subsistant encore dans la province de Namur.
Une flèche arbore la girouette aux armes de Marguerite de Courtenay. La restauration du porche réalisée par l'Architecte Francis Bonaert a été particulièrement bien réussie. (R. BLOUARD, Grandpré, p. 112)
ImageEn-dessous du linteau, une ornementation sculptée offre un blazon (un arbre). Comme l'année 1772 est clairement indiquée, ainsi que la devise : DELECTAMUR IN UMBRA gui est celle d'Etienne Defrène, qui fut abbé entre 1761 et 1774, il s'agit du blason de celui-ci.-Les armoiries de cet abbé étaient précisément un frêne, et c'est bien lui qui présida à la restauration du porche au Idème siècle.
Vu de derrière, le porche est semblable à une tour et comporte deux grandes fenêtres et au-dessous, deux autres semblables aux fenêtres d'une mansarde, comme on en voit beaucoup à l'époque, dans les abbayes cisterciennes du Namurois, comme par exemple à l'abbaye Saint-Remy à Rochefort. Une ouverture dans le toit a pu servir au guetteur.
ImageSi le premier carré des bâtiments claustraux n'existe plus à cause de la destruction de l'église, un second carré existe toujours, celui de la ferme. Celle-ci date du 18ème siècle et est encore le siège d'une activité agricole.
Les murs des soubassements sont de calcaire et les autres en briques et pierres bleues. La cour de la ferme avait une entrée indépendante grâce à un autre porche qui a été démoli en 1954.
En dehors des bâtiments claustraux et de la ferme se trouve l'ancien moulin avec le stordoir. A noter que le Samson passe en-dessous de l'abbaye, ce qui permetliait toute une série d'activités industrielles.

 

A-emplacement de l'abbaye ; B-cour des dépendances; C-cour de ferme, à cheval sur la canalisation souterraine du Samson; D-moulin

Image 


Cette section est empruntée au site de l'école de l'envol de Faulx-les-Tombes 

"Bien avant que le mot et l'idée ne deviennent à la mode, les cisterciens se sont montrés, à bien des égards, de parfaits écologistes. Vivant en autarcie, les moines ne produisent que ce dont ils ont besoin. Tout naturellement, qu'il s'agisse des ressources provenant des forêts, des terres agricoles ou des étangs, ils veillent à n'en pas tarir la source. La nature est liée à la Création et à ce titre doit être respectée"

l'ABCdaire des cisterciens et du monde de Cîteaux
 Dans cet état d'esprit, il fallait absolument que les eaux qui allaient drainer les latrines et les décharges d'eau usée provenant des cuisines, des réfectoires et du lavabo, quittent l'abbaye aussi pure qu'elles n'y étaient entrées.
Image
Samson canalisé avant de passer sous l'abbaye

 I. Le grand collecteur

 Par le principe des vases communicants, l'eau du Samson retenue dans le réservoir (4), arrive par des canalisations dans les fontaines des cuisines (3) et du lavabo (2). Par contre les eaux usées ainsi que les décharges des latrines étaient évacuées par des canalisations verticales débouchant directement dans le grand collecteur qui drainait celles-ci jusqu'à la sortie de l'abbaye avant de reprendre son cours normal dans les prairies et les bois.Image 

 1.latrines 2.lavabo 3.cuisine 5.conduites 4.réservoir Samson
 
Image
grand collecteur
 6. Déviation canalisée et voûtée du Samson qui passe sous l'abbaye et récoltait toutes les eaux usées.

II. Le bief alimentant le grand collecteur et le moulin (ou stordoir)

 Le Samson canalisé est divisé en deux embranchements à l'entrée de l'abbaye par un système de vannes-barrages. La partie la plus large , à gauche, en regardant l'abbaye, se dirige sous l'abbaye, dévalant tout d'abord une majestueuse cascade, puis s'engouffrant dans un impressionnant canal voûté.Image

 La grande cascade, construite sciemment en escalier, permet à l'eau, qui rebondit de marche en marche, de s'oxygéner un maximum. L'eau, saturée en oxygène, absorbe et épure les eaux usées provenant de l'abbaye. Ainsi, quelques trois cents mètres après sa sortie du grand collecteur, on peut dire que l'eau du Samson avait retrouvé sa pureté de l'amont de l'abbaye

Image

Image 





{mosmap width='400'|height='400'|lat='50.419018902737065'|lon='5.019550323486328'|zoom='6'|zoomType='Small'|ZoomNew=0|mapType='Normal'|text='Abbaye  de Grandpré '|key='ABQIAAAAv61XfAs8DaXTvDBWUGF-SRSUCeZEOkIAz1oQNvT0eGhUTek4dBTFoTvvMFpt6B1iG4w2s0pqCABdlA'''}.  



Image
Sceau de l'abbaye
En guise de conclusion, nous avons choisi le texte suivant de R. Blouard, un texte peut-être un pau trop idéaliste, maisqui reflète sans doute une partie de la réalité vécue à Grandpré.

"Le monastère géra son domaine avec circonspectior et vigilance. Malgré les crises de l'époque, le I8ème siècle le vit se maintenir une prospérité indéniable. Les moines mirent leurs richesses et leurs expérience au service des populations , ils cultivèrent la terre avec ardeur et intelligence.
Au point de vue social, leur exemple fut heureux pour les manants, dont "beaucoup engagèrent à l'abbaye tous ou une partie de leurs biens, pour se constituer des rentes sures. L'étendue du domaine abbatial rapprocha les habitants et les religieux ; dans tous les centres que l'abbaye occupa, autour des granges qu'elle exploita, se répandit la fraternité de l'Evangile. Le monastère eut son portier qui accueillit les pauvres, les malades ; tous recevaient les secours spirituels et matériels dont ils avaient besoin, les pèlerins trouvèrent l'asile le plus réconfortant".

(R. Blouard , L'abbaye de Grandpré - 1954)

Partager cet article

Articles similaires

Dernières mise à jour

En ligne dernèrement
General update: 19-01-2012 07:54
Scroll Up