En 1779, Gesves était une communauté nombreuse (200 ménages). Cette communauté avait un patrimoine commnun extrêmement Important : 335 hectares en bois et 442 hectares en trieux (terres agricoles en friche). Aussi n'y aura-t-il aucune difficulté à donner la part légale maxima, c'est-à-dire 1 bonnier (97 ares). Mais si le sol était fertile et la communauté riche, les manants étaient pauvres, car le puissant seigneur percevait des cens exorbitants et plus nombreux qu'ailleurs.
Il ne se contentait pas de deux stiers, ± 60 litres d'avoine (ce qui était déjà beaucoup) à la Saint-Remy, mais exigeait encore un stier le 1er janvier et des cens en épeautre, que le prévôt évaluait en 1753 à 40 muids au total ( 1 muid = 235 litres) et en argent,à 100 florins. Il était avantageux aux manants d'avoir un bonnier à cultiver, puiqu'ils conservaient encore un immense pachis; il y eut toutefois au début une sorte de mutinerie sous l'instigation du curé de Gesves car celui-ci semble avoir défendu les intérêts des fermiers qui avaient un nombreux bétail et une main-d'oeuvre abondante et très dépendante.
Selon P. Recht qui dirigea un ouvrage entièrement consacré à la division des "communes" à la fin du dix-huitième siècle, le seigneur de Gesves, le vicomte de Baillet, ne devait pas voir non plus le partage d'un bon oeil. Il avait des privilèges aussi exorbitants que ses droits seigneuriaux. Il ne se contentait pas conme les autres seigneurs du droit de plantis sur "tous les chemins et Warichets de la juridiction de ce lieu", mais il prétendait avoir "le droit de pâturage avec son bétail dans les communes et bois dits "de Huy" dans le cas même que le "teril"serait remis en bois et cela depuis la Toussaint jusqu'à Sainte-Gertrude". Il prétendait aussi avoir le droit de "faire pâturer des bêtes à laine depuis la Saint-Martin jusqu'au 15 mars, de temps immémorial (voir record de la justice du lieu, du 28 octobre 1773) droits qui ont toujours été rappelés dans les ventes, reliefs et dénombrements". Le puissant seigneur de Gesves ne résista cependant pas aux ordres du fonctionnaire Desandrouin et se borna à demander un dédommagement pour les droits de pâturage, sous la forme d'une part de communes en propriété.
(R. Delooz - les beautés du namurois, la région de Gesves)