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VIII. HUBERT MOUREAU de THON, écuyer.
Il était né en 1616. Il passa une partie de son enfance dans la pro¬vince de Luxembourg où la famille de sa mère était établie (43).
A la mort de son père en 1632, il devint seigneur de Thon. Il char¬gea le mayeur du lieu d'aller relever le fief à Namur, en son nom et place. Mais le relief ne fut pas enregistré et Hubert fut contraint par la suite à renouveler la formalité.
Il épousa Marguerite de Foulon, une veuve chargée de deux enfants mineurs. Elle avait en effet épousé, en premières noces, Louis de la Grange dont elle avait retenu deux enfants, Germain et Catherine de la Grange (48).
Hubert fut chargé d'administrer la fortune des enfants de sa femme. Ces derniers avaient hérité de leur oncle paternel Germain de la Grange qui portait le même prénom que son neveu. Cet oncle qui avait voulu que son corps reposât en la cathédrale de Dunkerque, avait laissé une somme de 3.500 frs à ses neveux.
Pour garantir la tutelle, Hubert dut justifier d'une fortune suffisan¬te ; la haufe cour d'Entre-Meuse et Arche certifia qu'il possédait 200 bon-niers dans les limites du baillage, et des rentes pour un montant de plus de 300 florins.
Marguerite de Foulon était la fille de Jean de Foulon, receveur et gruyer de Virton et St-Mard et de Françoise Aubertin.
Elle n'eut pas d'enfant du seigneur de Thon.
Sa fille, issue du premier mariage, épousa un militaire François de Mignot, officier de la compagnie du baron de Quaresme.
Hubert Moureau de Thon fut seign:ur du lieu pendant près de 60 ans. La vie à la campagne était rude au XVIIe siècle ; les guerres de Louis XIV transformèrent nos provinces en champs de bataille. Hubert ne put conserver intact le patrimoine de ses ancêtres ; en 1652, il avait vendu 11 bonniers dans le bois de Bien-haut-Fays à Jacques Zuallart, seigneur de Bonneville 4r ; en 1656, il aliéna le bois de Gor, contenant 10 bonniers, puis en 1664 celui de Malplume, qui contenait 33 bonniers. Ce dernier bois fut cependant racheté ultérieurement par Gilles de Mozet de Grune, en vertu du droit de retrait lignager, qui permettait à un parent de reprendre, à son profit, tout bien aliéné par une personne de la famille, à un étranger, pourvu que ce parent paye le prix consenti à la vente antérieure, verse une pièce d'argent symbolique et établisse sa parenté. En l'espèce, Gilles de Mozet de Grune était cousin, issu ger¬main, sa grand'mère paternelle étant Anne Moreau de Thon (voir tableau généalogique des seigneurs des origines à 1693).
Hubert entendait bien jouir des exemptions fiscales de la noblesse. Comme beaucoup de ses semblables, il fut mis en demeure de vérifier ses titres en justice. La procédure fut longue, comme de coutume, sous l'an¬cien régime, mais la reconnaissance de noblesse de race lui fut acquise. Le conseil provincial de Natnur rendit une sentence, par laquelle il dé¬clarait qu'Hubert avait suffisamment vérifié la qualité noble, par lui pré¬tendue, qu'il l'autorisait, dès lors, à jouir du port du titre d'écuyer et de tous honneurs, franchises et libertés appartenant aux personnes de sa qualité (4S).
Un cousin du seigneur, Albert Moreau de Gerbehaye, qui avait pas¬sé sa vie dans les armées, vint prendre sa retraite au château de Thon. On l'imagine volontiers, racontant ses voyages les soirs d'hiver, au coin de l'âtre. Ce militaire, réformé à la suite des blessures reçues au combat, possédait le domaine de la Vaux d'Aigle, vieille demeure fortifiée, flan¬quée de tours, qui existe encore aujourd'hui, et porte les armes de la famille. Une chapelle castrale était intégrée dans les bâtiments.
En récompense de l'hospitalité qu'il avait reçue de son cousin de Thon, Albert de Gerbehaye lui laissa son domaine avec les ornements et habits sacerdotaux, nécessaires au chapelain, pour célébrer les offices. Il léguait également des vases sacrés et un calice. Malheureusement, Hu¬bert ne conserva pas ce bien qui avait été possédé par la branche des Moreau de Gerbehaye ; il le vendit à Jérôme Bodart, receveur du cha¬pitre d'Andenne (49).
Les deux dernières années de la vie du seigneur de Thon furent malheureuses. En 1691, l'armée des alliés vint établir son camp à Mozet et aux alentours ; les habitants de Thon déclarèrent que les soldats étaient venus fourrager le village et particulièrement la grange de Monsieur de Thon.
L'année suivante vit le siège de Namur ; le village fut de nouveau livré au pillage. Comme les hostilités ne cessaient pas et que le siège traî¬nait en longueur, on ne put labourer comme les autres années. Comble de malheur, la récolte de 1692 fut désastreuse ; on recueillit à peine la moitié d'une récolte ordinaire. Comme il n'avait pas d'enfant, il avait fait donation à son cousin Gilles de Mozet de son domaine de Thon, à charge, pour ce dernier, d'acquitter les charges (hypothèques) qui le grevaient lourdement ; il s'était cependant réservé l'usufruit. Trois mois avant sa mort, il renonçait à tous ses droits au profit de 'a fille du dit Gilles, Marie-Marthe de Mozet, épouse de Nicolas-Joseph de Nollet.
Le 8 janvier 1693, alors qu'il était malade et alité, il fit un inventaire de tout ce que comportait le domaine de Thon et la seigneurie du lieu (50).
Ainsi, s'éteignit celui que l'on appelait le chef de la Maison et des armes des Moreau ; ceux-ci avaient donné 5 générations de seigneurs de 1480 à 1693 (51).
45 Les papiers anc'ens de la famille furent transportés dans le Luxembourg au XVII'
siècle ; ils dorment, peut-être encore, sous les combles de quelque vieille demeure.
46 Louis de la Grange était le fils de François de la Grange, gouverneur du château
de Jonelle et officier dans la compagnie du Marquis de Dyenne.
47 Jacques Zuallart, bourgmestre de Namur, fut anobli en 1640. Voyez Comte
CAPELLE : La Seigneurie de Sclayn-Bonneville. Le Guetteur Wallon, 1962, n° 2.
48 Conseil provincial, sentence du 19 février 1653.
49 La branche de Gerbehaye a produit de brillants capitaines :
Gérard de Moreau de Gerbehaye atteignit le grade de colonel ; son fils Wau.thier, fut capitaine de cavalerie au service du prince-évêque de Liège. Le fils de Wauthier fut capitaine au, régiment de la Bourlotte ; enfin, Wauthier César de Moreau de Gerbehaye, fut capitaine de 300 wallons au service de l'Autriche, puis major df 4 compagnies franches. Il mourut au champ d'honneur, ainsi que cinq de ses frères Voyez : Annuaire de la Noblesse, 1921. II, 212, L. LE FEBVE DE VIVY et P. DE BORMAN : La pierre tombale de Sinsin, dans L'Intermédiaire des généalogistes, n° 75, mai 1958, pages 145 et suiv.
BO Le document était signé H, Moreaux de Thon ; un inventaire du 6 octobre portait
par contre la signature H. Moureaux de Thon. 51 Un rameau de la branche des seigneurs de Thon s'établit au comté de Logne, dans
la principauté abbatiale de Stavelot-Malmédy. En effet, Gilles Moureau de Thon,
avoué de Sart-sur-Comblain et Poulseur et son épouse Isabelle de Celles de Harzé,
eurent 6 fils :
1° Godefroy, mayeur de Malmédy et chambellan du prince de Stavelot-Malmédy, qui épousa Catherine Rave, la fille du châtelain de Logne, qui devint potestat et conseiller du prince. La fille unique de Godefroy épousa Florent, avoué et vicomte d'Anthisne.
2° Lambert, seigneur du San en partie.
3° Gilles, qui fit ses licences en droit, et épousa Jeanne, dame de Vien-lez-An-thisnes, dont une fille épousa un sieur Bartholeyns et dont le fils, Gilles, épousa Catherine de Waha-Baillonville, veuve de Guillaume de Rahier, sgr de Poulseur. 4o Philippe.
5° Pierre, sgr à Haltinne (r. 1562), exécuteur testamentaire et légataire de Go¬defroy Moreau, sgr de Thon, épousa Anne de Moirmont, dont une fille épousa André de Brocart, vicomte palatin, puis Guillaume de Stanessoule, avocat à Liège. 6° Tierry, seigneur du Sart en partie, décédé le 12.9.1620, vit sa descendance se poursuivre jusqu'à nos jours dans les personnes suivantes : Gilles, décédé le 12 décembre 1645 ; Corneille, décédé le 16 novembre 1701 ; François, décédé le 23 février 1729 ; François Joseph, décédé le 1" juin 1770 ; Jean François, décédé le 5 juillet 1815 ; Hubert, décédé le 4 septembre 1818 ; François Joseph, décédé le 6 décembre 1868 ; Lambert, décédé le 27 décembre 1878 ; Léon MOUREAU, ingénieur à Liège, décédé le 28 décembre 1953. Ce dernier eu 2 fils : Paul MOUREAU, Professeur à l'Université de Liège, membre de l'Académie de médecine, époux de Marie-Thérèse de Booseré et Léon MOUREAU, Conseiller d'Etat, Professeur à l'Université de Liège, époux de Yvonne Capelle, qui ont deux fils : André, avocat, auteur de cette étude, époux de Bernadette Urbin-Choffrav. ei Jean-Claude.