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LES  RUINES.

Les ruines du château de Samson couvrent ces grands rochers qui s'élèvent, avons-nous dit, en face de Namêche. Il faut traverser la Meuse, à quelques pas du courant, dont les eaux agitées nous rappellent la victoire de S1 Materne sur le dieu Nam. Une vieille maison, près du rivage, semble conserver l'empreinte d'une prospérité depuis longtemps éteinte; là, en effet, se percevaient les droits à' appletaige ou de navigation comme nous dirions de nos jours 2. {styleboxjp width=200px,float=right,color=grey,textcolor=black}2 Chambre des comptes, n° 4004, Arch. du royaume. —« Tous batteaux arrivant en Yaulx soubs Samson par dechàl'eawe, chargeant quelque denrée que ce soit, il doit droit d'applelaige qui est pour chacun baiteau, un patart et un quart. Tous marchans chargeant leingnes doivent pour chascune corde, trois deniers de Namur, etc. »

Ce hameau, à l'entrée de la vallée de Samson, s'appelait autrefois en Vaux; un ouvrage avancé ou boulevard, dont on voit encore à mi-côte des débris considérables, défendait la gorge. Le chemin, qui longe le Hoyoux, passe au pied d'une tour parfaitement conservée, et qui n'est, peut-être, que cette tour Lapidon mentionnée dans la charte de 1253. Le vieux moulin, à quelques pas de là, est le moulin en Vaux dont nous avons cité un acte d'échange consenti par Foulque, le châtelain, au profit de Marie de Brienne. Une église, construite tout récemment, a remplacé la modeste chapelle élevée, auXVIIImc siècle,parla piété de Michel de Dongelberge, bailli d'Entre-Meuse et Arche. Une requête, très curieuse, fut adressée par lui, à cette occasion, au gouverneur-général des Pays-Bas '. {styleboxjp width=200px,float=right,color=grey,textcolor=black}1 « Le baron de Dongelberge de Corbecque, capitaine du château de Samson et bailly d'Entre-Meuse et Arche, démontre à Son Altesse Sérénis-sime gouverneur des Pays-Bas, que les manans de Samson, Meseray et autres lieux circonvoisins, dépendants de son bailliage, négligent depuis longues années d'entendre la messe, surtout eu hiver, et que cela provient qu'il n'y a plus de chapelle depuis la démolition du château. Cependant les prédécesseurs de Voire Majesté Impériale ont fondé un revenu annuel de 60 muids de grains, pour l'entretien du chapelain chargé de célébrer la messe au dit Samson, tous les dimanches et l'êtes, chapelle dont le patronage et collation lui appartient. Le chapelain, pourvu du bénéfice, étoit le chanoine Hoyoux, de la collégiale de S'e Croix, à Liège : il déclare ne pouvoir dire la messe au dit Samson, faute de chapelle, qu'il fait dire les messes d'obligation à Liège, et que dès qu'il yauroitune chapelle à Samson, il s'acquilteroit de ce dont il éloit chargé. Le dit capitaine, ne croyant faire une œuvre plus méritoire, tant pour la gloire de Dieu que pour le salut des âmes, a employé tous ses soins et n'a pas épargné les frais pour faire bâtir au dit Samson une chapelle qui a 56 pieds de long et 24 de large, qu'il a fait bien orner, et depuis six mois il y fait célébrer la messe, et que ledit Hoyoux diffère de s'acquitter de sa promesse. Le dit chapelain supplie Votre Altesse Sérénissime d'ordonner que le dit Hoyoux, ne remplissant pas sa promesse, soit déchu de son bénéfice, et qu'il lui permette défaire arrêter le bénéfice qui est affecté sur le revenu d'une disme dans la province de Namur, jusqu'à ce que Votre Altesse Sérénissime ait pourvu un sujet capable de s'acquitter dignement des dites fonctions.» Liasses delà cour de S1 Germain. Archives de l'Étal, 4755 —On fit saisie du bénéfice de la chapelle, qui se levait à S1 Germain, et un huissier notifia au chanoine que, par ordre de Sa Majesté, il avait fait saisie du temporel de la fondation du bénéfice castrai du château de Samson, 1735.
Les débris de carrière ont fait disparaître un chemin très escarpé, beaucoup moins long que celui que nous suivons, et qui, autrefois, conduisait à la porte de la seconde enceinte du château. Bientôt les escarpements s'abaissent et forment un petit vallon : nous sommes à l'endroit où le promontoire de Samson se soude au plateau voisin, à l'isthme. Un retranchement, très visible sous les broussailles, servait de défense de ce côté, et l'emplacement de la porte semble encore indiqué par une ouverture qui donne accès dans la première enceinte du château (A). Ici, nulle trace de constructions : ces vieux murs ne renferment, comme au XIIIme siècle, que des champs et des terres vagues. C'est dans le petit pré, qui s'étend devant l'entrée, que fut trouvé le cimetière franc dont nous avons parlé précédemment.

La seconde enceinte (B) renfermait la basse-cour, dépendance nécessaire de toute demeure féodale ; aussi ses approches étaient-elles fortement défendues. Un ravin naturel s'étendait devant les murailles, protégées, en outre, par un ouvrage avancé qu'il fallait traverser pour arriver à la porte de l'enceinte. Contre celle-ci, et vers le midi, s'élevait une grosse tour qui dominait toutes les défenses. Adossées à la porte, vers l'intérieur, étaient la demeure du portier, puis les habitations des guetteurs chargés de surveiller nuit et jour, du haut des murailles, les alentours delà forteresse. Plus avant, dans les buissons, ces ruines nous montrent l'emplacement de la chapelle, des écuries, des granges, et de la maison du chairier ou receveur. L'entrée du donjon était interdite aux manants '. {styleboxjp width=200px,float=right,color=grey,textcolor=black}1 Chambre des comptes. Domains de Namur. Archives du royaume,
n° SSS't. «    placqueurs, pour avoir ouvré à refaire tous neufs les « fours du chasteau , c'est assavoir, ung au donjon, ung en la basse-court, avec ce avoir replacquié toutes les parrois du comble de le prison de la » basse-court, refait une testrée en le maison au plus près de le porte, et refait deux cheminées à le maison des gaittes et en plusieurs lieux aval la maison de la chairie ". Acquits de Lille. Rcc. gén. du comte de Namur, n° -198$. «    por 4 serures mises et employées au dit Sanson,» c'est assavoir, l'une à l'huys de le prison de le basse-court, l'autre à » l'huys du guet de la seconde porte, la troisième sur le grenier où on a » mis les grains de la garnison. .... ». 1475.


ImageUn large fossé, creusé dans le roc, nous sépare ensuite de la troisième enceinte (C); les blocs énormes de maçonnerie, qui comblent en partie ce fossé, accusent les ravages des mines de 1691. Après avoir franchi le pont-levis 2, {styleboxjp width=200px,float=right,color=grey,textcolor=black}2 Acq. de Lille. Rec. gcn. du comte de Namur. « A Hennequin l'esquareur, pourparxxmjoursavoirabaUu et esquarrémairiens au boisdeRouveroy, pour employer à la réfection du grant pontde la chastellerie, lequel il a fallu refaire tout neuf    »

on se trouvait en présence de la porte St Jean, surmontée d'un écusson aux armes de Guillaume II et de Jeanne de Harcourt ; une inscription rappelait, les importantes réparations qui avaient été exécutées par ce comte au château, en 1404 3. {styleboxjp width=200px,float=right,color=grey,textcolor=black}3 GRAMAYE. Ant. belg. Balivatus Sansonensis.

Nous avons retrouvé parmi les décombres une partie de ces armoiries. Près de cette porte, et vers le midi, se trouvait une tour aux dimensions colossales : c'était le donjon, principale défense et dernier refuge pour l'assiégé. Vu son importance, il était toujours entretenu avec soin.

Ainsi en 1472, cette tour ayant été fortement endommagée par la foudre, douze maîtres de maçonnerie furent convoqués par le châtelain, pour la visiter et juger de quelle manière elle pourrait être refaite '. {styleboxjp width=200px,float=right,color=grey,textcolor=black}1 Acq. de la chambre des comptas, à Lille , n" '1972. — Ch. des comptes,dom. de Namur, »° 5xï45. «por refaire n venteaux de le grosse tour d'i dit Sanson qu i estoient en péril de cheoir, et si fuissen t cheu, ils euiss;';it effondu et rompue toute la maison du chastellain    »Idem. n° 37264. «    pour 169 journées employées à recouvrir et » réparer les thois des bâtiments du château, c'est assavoir à la grande
» thour fort endomagée du fouldre et thonnoir    ». 1655.


Une seconde tour, bien moins considérable, flanquait l'autre extrémité du fossé, vers la Meuse. Un bâtiment, près du donjon , portait le nom de chastellerie ou demeure du châtelain; indépendamment des appartements à l'usage de celui-ci, il renfermait la grande salle et une chambre appelée la chambre Guillemette, en souvenir, sans doute, de Guillaume II, qui l'habita 2. {styleboxjp width=200px,float=right,color=grey,textcolor=black}2 Acq. de Lille. Piécettes ge'n. du comté de Namur, n° 4985. «    por 4 grandes serures mis aux ouvrages du donjon, c'est assavoir, l'une des  dites serures appartenant à la montée de le grande salle du dit Samson, le seconde à la chambre Guillemete, le tierce à la huys du puische, et le 4e à la chambre du capitaine du château , au prix de    ». 1475.

Cette partie du château renfermait encore un magasin à provisions, un four, un puits et un chenil. La position et les défenses de cette troisième enceinte la rendaient imprenable au moyen âge.

Tout à l'extrémité du promontoire, et derrière les constructions dont nous venons de parler, se trouve une caverne creusée dans le rocher; elle servait à relier le château à l'ouvrage avancé qui commandait la vallée. Les marches, qui y sont taillées , étaient interrompues, dans certain endroit, par un escalier en bois qui s'enlevait dans un danger pressant, et rendait ainsi toute communication impossible. Les comptes mentionnent encore d'autres cavernes sur le plateau de la forteresse, comme le trou Baiau, St Patris, etc. En temps de paix , une grande échelle permettait de descendre de cette troisième enceinte au bord de la Meuse; on évitait ainsi un long détour '. {styleboxjp width=200px,float=right,color=grey,textcolor=black}1 Ch des comptes. Dom. de Namur, u6 3252. «    por une neufve escielle vers Namech, par où on va vers la rivière de Meuse de la fortresche de Samson, qui est faille de deux gros chesnes    ». 1466.

Les anciens documents renferment encore de nombreux détails sur les constructions, les défenses et l'armement du château; nous ne les mentionnerons plus ici, ayant, dans l'histoire du château de Montaigle, décrit longuement les principales dispositions d'un château féodal.

Comme dans tous nos vieux castels, une gatte d'or est enfouie sous les ruines de Samson. Où est-elle? nous l'ignorons; mais gardez-vous bien de la chercher, car elle est protégée par l'esprit malin qui ne manquerait pas de jouer un mauvais tour au dénicheur de trésor.

Une excursion aux ruines du château de Samson est une des plus jolies promenades des environs de Namur; aussi un vieux Namurois, Jérôme Pimpurniaux, y conviait-il déjà la jeunesse de son époque. Dans son enthousiasme, le digne procureur
s'écriait du haut de ces ruines : «    Quel vaste paysage se
» déploie à vos pieds ! Comme la Meuse, capricieuse et fantas que, roule avec grâce ses ondes vertes et transparentes ! D'un » côté Sclayn et Andenne ; de l'autre Marche et Brumagne , et  dans le lointain le sommet de notre vieille citadelle. Vous  foulez des décombres, des pans de mur tellement solides,  qu'ils sont tombés d'une pièce comme les hommes d'armes  qui les défendaient : vous êtes au-dessus du château de Samson. » {styleboxjp width=200px,float=right,color=grey,textcolor=black}2 Légendes Namuroises, publiées par A. Borgnet, pag. 170.

 

ALFRED BEQUET.

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General update: 19-01-2012 07:54
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